Réponse de la Commission Européenne à l’initiative citoyenne pour la fin des cages : Déconnexion avec la réalité ou virage protectionniste historique ?

Réponse de la Commission Européenne à l’initiative citoyenne pour la fin des cages : Déconnexion avec la réalité ou virage protectionniste historique ?

Le 30 juin 2021, la Commission européenne a publié sa communication répondant à l’initiative citoyenne européenne (ICE) « End the Cage Age ». A travers cette communication, la Commission propose la suppression progressive des cages pour les animaux d'élevage d'ici la fin 2027.

La Commission accompagne cette proposition d’une étude d’impact qui devrait être achevée d'ici la fin de 2022, et permettre d’analyser la faisabilité d’une entrée en vigueur à l’horizon 2027. Si la CFA salue la volonté de conditionner la mise en œuvre de cette proposition à une analyse d’impact, elle déplore l’ignorance de la Commission sur les impasses techniques en matière d’alternatives à la cage dans certains secteurs,  le manque de considération pour les efforts déjà réalisés par les éleveurs,  et l’absence de propositions ambitieuses et crédibles pour accompagner les éleveurs, garantir la souveraineté alimentaire européenne et assurer la transparence vis-à-vis du consommateur.

Un manque de considération cruel pour les éleveurs dont les standards de production sont les plus élevés au monde

Dans son communiqué de presse du 30 juin, l’enthousiasme de la Commission Européenne pour répondre positivement à l’ICE, lui a semble-t-il fait oublier que l’Union Européenne est une des zones du monde où les standards en matière de bien-être animal sont les plus élevés, et où les éleveurs depuis des décennies, s’adaptent, directives après directives, règlements après règlements aux nouvelles attentes. Des évolutions qui déjà par le passé ont été assorties d'études d'impact sans jamais avoir abouti à des soutiens et mettant nos filières en danger : les investissements colossaux réalisés par les éleveurs de poules pondeuses pour être aux normes en 2012 ou ceux réalisés par les éleveurs de canards gras pour être aux normes en 2015 en sont de très bonnes illustrations. Au lieu de ça, les commissaires cités dans le communiqué encensent l’initiative citoyenne - qui rappelons-le a été soutenue et portée par certaines organisations (pas toutes) menant des actions illégales et violentes dans nos élevages - mais oublient de dire un seul mot sur les éleveurs. Désespérant.

Des propositions insuffisantes et qui manquent de crédibilité

La Commission affirme que l’UE fournira le soutien financier aux agriculteurs afin de procéder à la transition vers un système sans cages, par le biais de la nouvelle PAC et via le fonds pour une transition juste. Elle aurait pu ne rien écrire, le résultat aurait été le même. Si une transition doit s’engager, la Commission doit dégager une ligne budgétaire dédiée et non renvoyer à des dispositifs existants. Concernant les aspects liés au commerce international, la Commission explique qu’elle se servira de l’étude d’impact pour analyser les options possibles permettant de répondre aux préoccupations. Ces options pourraient prendre la forme d’une amélioration de la coopération avec les partenaires commerciaux, l’imposition des normes de l’UE sur les importations ou la mise en place d’un label BEA qui pourrait s’appliquer aux importations. Elle ajoute que ces options devront être en conformité avec les règles de l’OMC. La CFA salue ces propositions. Malheureusement, à ce jour, elles ne sont pas compatibles avec les règles de l’OMC. En effet, les questions de bien-être animal ne sont pas couvertes par les règles du commerce international. Comment la Commission compte s’y prendre à moins de changer radicalement sa politique commerciale, ce dont nous nous permettons de douter ?

Les éleveurs sont prêts à réaliser des transitions. Mais la Commission doit tenir compte des impasses techniques notamment concernant l’élevage des animaux reproducteurs, toutes espèces confondues. Si nous acceptons l’idée d’une transition de nos modèles d’élevages, nous refusons catégoriquement l’imposition d’une date butoir, principe qui est en inadéquation avec la nécessité de s’adapter continuellement aux marchés tout en préservant la souveraineté alimentaire de l’Union Européenne.

Jean-Michel Schaeffer / Président de la CFA