Répercussion de la hausse des coûts de production : les actions de la CFA

Dès le mois d’octobre 2020, le coût des matières première agricole a augmenté, provoquant de fait une augmentation très importante du coût de l’alimentation animale. Les aviculteurs, dont le coût de production dépend à plus de 60 % du coût de l’alimentation, sont particulièrement touchés.

Alors que la loi EGAlim a introduit dès 2018 des outils devant permettre une meilleure prise en compte des fluctuations des coûts de production des agriculteurs grâce à une contractualisation renforcée et la mise en place d’indicateurs de coûts de production et d’indicateurs de marché, les négociations commerciales avec les enseignes de la distribution ont été très compliquées. La CFA, avec la FNSEA et l’UGPVB (dans le secteur des œufs) a dû se mobiliser à plusieurs reprises cet hiver pour faire entendre les difficultés des éleveurs avec plus ou moins de réussite selon les secteurs. Par ailleurs, une proposition de loi, baptisée « EGAlim 2 », a été examinée à l’Assemblée Nationale au début de l’été et devrait être examinée au Sénat au mois de septembre. Elle renforce les outils de la loi Egalim en instaurant notamment la non négociabilité de la matière première agricole.

indices itavi

Positions et actions de la CFA

Communiqués de presse et mobilisations syndicales

Dès le début du mois de décembre 2020 la CFA alertait par communiqué de presse sur le risque encouru par les éleveurs si la répercussion de l’augmentation de leur coût de production n’avait pas lieu. En plus de ces communiqués, le réseau CFA a participé aux appels à mobilisation lancés par la FNSEA et JA sur la même thématique. Si certains distributeurs ont semblé être plus à l’écoute dès le mois de janvier 2021, notamment dans la filière Volaille de chair, d’autres sont restés sourds face à la situation. Cela a conduit la CFA à cibler plusieurs enseignes dans un communiqué du 8 février 2021.

Dans la filière œuf, la situation a continué à s’aggraver conduisant la CFA à appeler à la mobilisation des éleveurs de poules pondeuses, avec l’UGPVB et les FRSEA Bretagne et Pays de la Loire le 25 février, devant les enseignes Carrefour, Casino et Aldi et à lancer un ultimatum au 15 mars pour une revalorisation des prix et la mise en place d’une indexation. La dernière étape des actions a eu lieu le 1er avril et s’est traduit par le blocage de plusieurs centres de conditionnement d’œufs dans le grand ouest pour perturber l’approvisionnement des distributeurs.

Dans le secteur des œufs, les résultats obtenus sont plutôt mitigés : malgré une évolution du positionnement d’un certain nombre d’enseignes de la distribution quant à la prise en compte systématique des indices Itavi, dans le cadre des négociations sur les marques distributeurs, les revalorisations sur les marques nationales ont été quasi inexistantes ou en tout cas largement insuffisantes. Il est à noter que la situation de surproduction dans la filière œufs dû à la période de transition en cours vers l’élevage alternatif n’a pas facilité les négociations.

Dans le secteur de la volaille de chair, les hausses ont été, semble-t-il, davantage répercutées mais pas dans leur totalité, ne permettant pas une revalorisation du prix aux éleveurs mais simplement un « maintien ». Dans le secteur du lapin, les hausses ont également été plutôt bien répercutées (sauf pour quelques enseignes).

Enfin dans le secteur du foie gras, les inquiétudes sont vives pour la fin de l’année sur ce sujet qui avait été « mis de côté » pendant la crise Influenza. La Cifog a alerté au mois de mai sur l’augmentation des coûts de production sans provoquer de réactions, semble-t-il, côté distribution. La CFA et la FN Foie Gras restent très attentifs à la manière dont se déroulent les négociations.

manif oeufs - crédit : FRSEA Bretagne

La proposition de loi du député Grégory Besson-Moreau ou loi « EGAlim 2 »

Les difficultés rencontrées par l’ensemble des filières face à l’augmentation du coût des matières premières et le rapport rendu par Serge Papin sur le bilan de la loi EGAlim ont conduit un député de la majorité (Grégory Besson-Moreau) à faire une proposition de loi visant à renforcer les dispositifs introduit par la loi Agriculture et Alimentation, dite loi « EGALim ». L’une des principales propositions du texte réside dans la non-négociabilité du prix des matières premières agricole, autrement dit, une indexation du prix d’achat, par les distributeurs, sur les coûts de production des éleveurs. La CFA a salué cette proposition et espère la voir se concrétiser et s’appliquer effectivement dans les secteurs avicoles et cunicole. Toutefois, plusieurs éléments sont à déplorer notamment l’exclusion des marques de distributeurs du champ d’application de la loi ou encore l’absence de solutions concernant la manière dont seront traités les produits importés.

Les actions auprès des partenaires des filières et des interprofessions

Le réseau syndical ne pourra sans doute pas se mobiliser comme il l’a fait cette année, chaque année. Il est urgent de faire en sorte que les outils qui existent en matière de prise en compte des coûts de production soient mis en œuvre concrètement. Par ailleurs, si le débat s’est focalisé sur le coût de l’aliment ces derniers mois, force est de constater que les autres postes de charges ne sont pas souvent évoqués. Les éleveurs font non seulement face à une augmentation du coût de l’aliment mais aussi à une augmentation du coût de l’énergie, à une augmentation de leur temps de travail et à une baisse de productivité (dû à la mise en place de nouvelle pratiques, notamment en faveur du bien-être animal). A cela s’ajoute des investissements supplémentaires qui pèsent sur les comptabilités des éleveurs.

A ce titre, la CFA fait pression dans l’ensemble des interprofessions pour accélérer le travail sur la construction des indicateurs de coûts de production notamment dans le secteur de la volaille de chair et des œufs. Dans la filière œufs, le travail a démarré sous l’égide de l’Itavi pour aboutir à la mise en place d’indicateurs de coûts de production agrégés pour chaque code. Ces indicateurs devront être à tout prix reconnus officiellement par l’interprofession pour qu’ils soient effectivement utilisés par les opérateurs. Dans la filière cunicole, ces travaux ont déjà abouti à un indicateurs agrégé, diffusé au sein de la filière, de même que dans la filière foie gras.

Par ailleurs, La CFA a adressé un courrier au début de l’été au SNIPO, à la FIA et au Cnadev pour leur demander une rencontre afin d’échanger sur la question de l’augmentation des coûts de production et de leur meilleure prise en compte.

oeufs

Perspectives

La problématique de la prise en compte des coûts de production demeure une priorité et les travaux, au sein des interprofessions se poursuivent. Cependant, il convient aussi à ce que les changements apportés ou envisagés, en matière de règlementation sur le bien-être animal notamment (transport, cage, etc) le soient sur des bases scientifiques et concertées et dans le cadre d’une progressivité dans leurs mises en œuvre. A cela doit s’ajouter la nécessaire réciprocité entre les règles imposées à nos productions et celles en provenance de pays-tiers. Sans cela, le déficit de compétitivité de nos élevages les conduira à mettre la clé sous la porte et de fait, affaiblira la souveraineté alimentaire de la France.

En plus de ces aspects réglementaires, les opérateurs des filières doivent aussi prendre la mesure de l’importance à agir volontairement pour permettre la consommation de produits « Origine France » ; à ce titre la charte METRO, dans laquelle la CFA est investie et qui a été mise « en pause » pendant la crise sanitaire, doit monter en puissance dans les prochains mois en nouant par exemple des partenariats avec des interprofessions.

Enfin, comme déjà évoqué, le syndicalisme avicole, n’est pas prêt à se mobiliser chaque année, comme il l’a fait l’hiver 2020/2021. Il est plus qu’urgent que le travail au sein des interprofessions sur la meilleure prise en compte des coûts de production se concrétise sur le terrain. Nos filières, déjà très contractualisées devraient être exemplaires sur le sujet.