Jean-Michel SCHAEFFER
Billet d'humeur
Jean-Michel SCHAEFFER

Interdiction des cages, fin de l'élimination des poussins mâles, mais qui va payer ?

Un peu plus d'une semaine après l'annonce de la Commission Européenne répondant à l’initiative citoyenne européenne (ICE) « End the Cage Age », qui propose la suppression progressive des cages pour les animaux d'élevage d'ici la fin 2027.

Le ministre de l'Agriculture français annonçait qu’un décret serait pris d’ici la fin de l’été pour interdire l’élimination des poussins mâles en 2022. Sur les deux sujets, les filières avicoles et cunicole françaises avancent, depuis plusieurs années, en cohérence avec les techniques existantes et avec les marchés. Des interdictions pures et simples, à court terme, de certaines pratiques risquent d'avoir un effet destructeur sur nos filières, en favorisant l'importation de produits en provenance de pays-tiers ou même d'Union Européenne, ne respectant pas les mêmes règles.

Sur la question des alternatives à l'élimination des poussins mâles, tous les couvoirs ne peuvent pas investir au même rythme et la menace d'une délocalisation et d'une concentration de l’accouvage plane. Sur la question des cages, si l'Union Européenne ne renforce pas ses règles en matière de commerce international, la souveraineté alimentaire sera grandement menacée, or, les questions de bien-être animal ne sont pas couvertes par les règles du commerce international. Comment la Commission compte donc s’y prendre à moins de changer radicalement sa politique commerciale, ce dont nous nous permettons de douter ?

Les éleveurs sont prêts à changer leurs pratiques, ils les font évoluer d'ailleurs constamment et de plus en plus rapidement, parfois au détriment de la rentabilité de leur élevage ou de leur bien-être à eux. Seulement, plus les éleveurs répondent aux nouvelles attentes, plus les nouvelles attentes se multiplient. Alors que la filière œuf est en pleine transition de ses modes d'élevage, le surcoût engendré par la mise en œuvre des alternatives à l'élimination des poussins mâles est estimé à 64 millions d'euros par an. Qui va payer ? A la CFA nous demandons clairement que ce surcoût soit répercuté entièrement au consommateur.

Enfin, concernant la transformation des élevages vers le tout "hors-cage", il est important d'insister auprès de nos concitoyens qu'il y a d'importantes impasses techniques selon les secteurs : le logement individuel des animaux reproducteurs est aujourd'hui nécessaire dans le cas de bon nombre d'espèces pour éviter que les animaux soient agressifs entre eux (comme cela peut-être le cas dans la nature) et se blessent. Les attentes sur le bien-être animal ne doivent pas être guidées simplement par des perceptions humaines mais doivent s'appuyer sur des faits scientifiques. Nos instituts techniques et de recherche ont déjà produit beaucoup de matière sur ces sujets et nous continuerons de faire en sorte que les résultats de ces travaux s'enrichissent et contribuent à des prises de décisions justes et réfléchies au niveau européen et national.